Sur cette période, les traitements des enseignants ont certes été revalorisés mais sans rattraper les hausses du coût de la vie et sans compenser l'augmentation des charges sociales (CSG, assurance-maladie, retraite, etc.). Les auteurs reconnaissent qu'une partie du pouvoir d'achat n'a pas été prise en compte dans l'étude, notamment les indemnités versées à certains enseignants (primes ZEP, prime d'orientation des élèves, etc.) : ils insistent néanmoins sur le fait que, dans l'éducation nationale, le montant de ces indemnités "joue un rôle mineur" dans les rémunérations.
Cette érosion ne touche pas toutes les catégories d'enseignants de la même façon. "Les instituteurs sont ceux qui s'en tirent le mieux, avec une baisse de traitement réel net (qui correspond au pouvoir d'achat) de 9 % seulement durant la même période", indique l'étude. La transformation du corps des instituteurs en professeurs des écoles, avec une revalorisation de leurs traitements, leur a apporté, à partir de 1990, une relative "bouffée d'oxygène".
Les enseignants du secondaire et du supérieur n'ont pas bénéficié, à l'époque, d'une revalorisation aussi forte et ont donc subi une érosion plus nette de leur pouvoir d'achat : - 20 % pour les certifiés en fin de carrière, - 20,6 % pour les agrégés, - 16 % pour les maîtres de conférences et - 20,6 % pour les professeurs.
Cette perte de pouvoir d'achat n'a pas empêché le budget de l'éducation nationale de progresser. La hausse des pensions, avec de nombreux départs en retraite, l'augmentation des charges sociales et, surtout, la croissance du nombre de fonctionnaires (+ 18,6 % sur la même période) ont contribué à accroître les dépenses de l'Etat.
"Les syndicats d'enseignants se sont montrés incapables d'enrayer le mouvement de baisse des salaires. Cette constatation apparaîtra comme un paradoxe à ceux qui pensent que les syndicats de la fonction publique s'adjugent une part du gâteau toujours plus grosse", souligne l'étude. Les économistes expliquent que les syndicats ont fait le choix de défendre l'emploi et de revendiquer l'amélioration des conditions de travail dans les classes.
Cette stratégie s'est notamment traduite par des décharges de service plus nombreuses et par la baisse régulière du nombre d'élèves par classe. L'obtention de ces acquis sociaux explique, aux yeux des économistes, que les enseignants aient pu supporter une telle régression salariale "sans finalement trop protester". Les effets mécaniques de l'avancement ont aussi pu leur masquer individuellement la perte de pouvoir d'achat subie.
"Les syndicats ont donc gagné plus de confort au travail pour les enseignants tandis que le gouvernement réalisait certaines économies. Mais, ce faisant, ils se sont faits les complices d'une dévalorisation progressive du métier d'enseignant", relèvent les économistes. Depuis le début des années 1990, la plupart des conflits sociaux, dans l'éducation nationale, se sont cristallisés autour de sujets liés aux retraites, à la décentralisation, à des réformes pédagogiques, aux moyens budgétaires, mais beaucoup moins aux salaires.
Dans leur étude, les auteurs formulent l'hypothèse que la féminisation du corps enseignant (50 % des professeurs du secondaire en 1981, 64 % en 2001) ait pu faire évoluer le type de revendications : "Le tournant de la rigueur est vraisemblablement concomitant d'un changement des préférences dans la négociation collective." Les enseignantes auraient ainsi privilégié les conditions de travail sur les salaires. Dans un contexte d'arrivée de "nouveaux publics", jugés plus difficiles, l'amélioration des conditions de travail aurait également été perçue comme une priorité.
1 commentaire:
On ne demande rien...On n'a donc rien. BAC+4, 7ans d'ancienneté (enfin 8)...Et interdiction formelle d'acheter des chaussures au Bon Marché (ou même à la Varenne). LA vocation, c'est tout... A cause de cela ,(appelé "amour du métier" par les idéalistes), on nous ferait aller au bout du monde en RER...
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