29 juin 2006

"Le style est l'homme même" (Buffon)

Chépavoumémoi, je lis presque toujours les tracts politiques qu'on me donne dans la rue ou qu'on m'envoie chez moi.
Quand j'en reçois un, je me sens un citoyen à part entière, tout comme les jours où l'on va voter. Mon ego d'insignifiant est flatté: "Quoi ? Un homme important m'écrit personnellement pour me faire part de ses vues sur la France ? Ouah, il doit penser que je suis quelqu'un d'important aussi...".
Bref, je me sens citoyen que j'en suis tout ému. Dans ces tracts -comme dans la vie politique-, la forme est en général au moins aussi importante que le fond. Surtout qu'à l'écrit, chaque mot est pesé, soupesé par des bataillons de tirailleurs-communiquants. Alors je guette un peu les lourdeurs, les fautes, les outrances,


voire les mots nouveaux, les mots-qui-viennent-des-djeun's, les mots-choc, le politiquement correct. Et des fois, on n'est pas déçus. Je me rappelle notamment la lettre de l'entre-deux tours que le maire de ma commune nous avait envoyée lors des élections municipales


et qui était littéralement constellée de fautes d'orthographe et de syntaxe telles qu'un élève de fin de CM2 y eût trouvé matière à rougir. Cela avait fait les délices de l'opposition de gauche (Allez les gars, on les aura !) et les gens en rigolaient dans la rue, au Monoprix...


Un petit vieux sympathique que je ne connaissais pas m'avait même accosté alors qu'on attendait le bus. Il avait le tract dans la poche et l'a sorti pour me citer religieusement -avec le doigt en l'air svp- ses passages préférés. Et là, moment jubilatoire de cohésion citoyenne malgré nos 50 ans d'écart, on est montés dans le bus tous les deux en se fendant ultra-généreusement la poire.

Bon, ça l'a pas empêché d'être réélu, l'autre. Ca doit être ça, le redoublement en politique: t'as pas le niveau en orthographe pour passer dans la classe supérieure: redoublement d'office ! Tu repiques pour un nouveau mandat... Pourtant on l'sait que y'en a pour qui ça sert à rien de redoubler !
En attendant, je n'ai pas pu garder pour moi seul cette pépite sémiologique, ce grand moment d'exploration du langage, cette formidable explosion lexicale, ce gisement d'or pur que je viens de recevoir à l'instant.
Et ça vient de qui cette prose aérienne ?
Dès qu' il ouvre la bouche çui-là, on a envie de lui dire "A tes souhaits !"
Nan, pas vous ?

1 commentaire:

chemato a dit…

je trouve qu'un politique qui souhaite ne peut que nous apporter du bon...